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10.05.2022

Quels leviers de négociation pour renforcer l’attractivité des emplois des collectivités territoriales ?

Si le faible niveau des rémunérations est la principale explication au manque d’attractivité des emplois de la fonction publique territoriale, DRH et syndicats s’accordent à dire que la négociation doit aussi porter sur la qualité de l’environnement de travail.

« L’emploi à vie n’est plus un levier d’attractivité, pas plus que l’intérêt général », considère Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et co-auteur du rapport sur l’attractivité de la fonction publique territoriale, remis en janvier 2022 à Amélie de Montchalin, Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques.

Sans surprise, le rapport place le faible niveau des rémunérations comme la principale source du manque d’attractivité des emplois. « En Île-de-France par exemple, où la concurrence sur les emplois est rude entre collectivités, les agents ne comparent pas seulement leurs salaires mais aussi la qualité de leur environnement de travail. Le bouche à oreille fonctionne très bien », poursuit celui qui se trouve par ailleurs être maire de Sceaux, dans les Hauts-de-Seine.

L’annonce du dégel de la valeur du point d’indice, colonne vertébrale de la rémunération des agents, qui se trouve totalement à la main de l’exécutif est loin d’être la solution miracle. Pour Philippe Laurent, « le point d’indice ne doit pas exonérer d’une réflexion sur les métiers et la place des rémunérations indemnitaires sur lesquels nous avons la main. Du moins théoriquement car nous n’avons plus l’autonomie fiscale nous permettant de les financer ».

Alors que les collectivités ont désormais la possibilité de négocier des accords collectifs sur tous les sujets, à l’exception du point d’indice, les syndicats considèrent qu’il faut redonner un sens à la carrière. « Mais il ne faut pas privilégier des métiers par rapport à d’autres avec des mesures indemnitaires spécifiques. Nous souhaitons une approche globale de ce qui se négocie localement dans les collectivités pour conserver de la cohérence, tirer vers le haut et ne pas entretenir la concurrence entre les employeurs territoriaux », explique Dominique Régnier, secrétaire de la fédération FO des territoriaux, qui place le point d’indice comme le pivot d’une politique de rémunération. Même priorité pour la fédération CGT des services publics qui plaide pour une “fonction publique de carrière” et de l’UNSA fonction publique qui revendique une augmentation de 10 % de la valeur du point.

Quelle place ont les leviers périphériques ?

Mais l’attractivité ne se limite pas à la stricte rémunération. « Le temps partiel non choisi pose un vrai problème d’attractivité », considère ainsi Luc Farré, secrétaire général de l’UNSA fonction publique, qui plaide par ailleurs pour laisser un maximum de liberté de choix aux agents : « ce n’est pas parce que les agents ont un accès privilégié à la crèche municipale qu’il ne faut pas leur proposer de plutôt choisir avec des titres de services préfinancés pour la garde des enfants, car le besoin n’est pas le même ». Une illustration de la place que peuvent prendre des leviers périphériques de rémunération que les employeurs privés ne se privent pas, eux, de mettre en avant auprès des candidats.

Les titres-restaurant se trouvent ainsi moins développés dans le public alors que 20 % des agents au maximum ont pourtant accès à un service de restauration collective. Le développement du télétravail a par ailleurs renforcé la tendance à la baisse du taux de fréquentation. « Il y a une véritable inégalité de traitement des agents pour accéder à un service de restauration collective qui ne concerne que les gros sites alors que les agents peuvent être très dispersés », note Dominique Régnier.

La lutte contre les inégalités de traitement constitue un sujet central pour les syndicats de la fonction publique territoriale car chaque collectivité est libre de déterminer sa politique sociale. “Les besoins en matière de restauration et de garde d’enfants sont réels. Il s’agit d’y répondre, indépendamment de la politique salariale, en prenant garde de ne pas creuser une fracture entre les communes. Il y aurait besoin d’une offre socle qui s’impose à toutes les municipalités”, considère ainsi Christophe Couderc, secrétaire fédéral à la CGT des services publics.

« Les 1 607 heures de travail par an qui s’imposent désormais dans toutes les collectivités s’accompagnent de compensations. Le titre-restaurant en fait partie. C’est à la fois un gage d’attractivité pour les agents et un levier de dynamisation du commerce local », explique David Verzeaux, directeur des ventes du pôle public du groupe Up qui souligne aussi la problématique des coûts des déplacements domicile-travail pour les agents.

Question protection sociale complémentaire en revanche, l’État joue l’alignement puisque les employeurs territoriaux ont jusqu’au 1er janvier 2026 pour négocier avec les syndicats les modalités d’une prise en charge obligatoire à minimum 50 % en santé comme cela s’impose dans le privé depuis 2016. Le taux de participation moyen atteint déjà 58 % grâce à la négociation. Lorsque qu’un maire annonce sa volonté de mettre en place des titres restaurants pour les agents de la ville, c’est plutôt une bonne nouvelle mais “cela ne doit pas se traduire par une décision unilatérale”, rappelle Valérie Poisson, de la direction des partenariats et de la coopération du groupe Up qui souligne l’importance pour les syndicats d’anticiper au maximum pour engager des négociations, notamment sur le niveau de prise en charge par l’employeur.

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